En décembre 2023, Diversions rencontrait les frères Putzulu, Bruno et Mario, venus au GRRRANIT SN à Belfort répéter leur nouvelle pièce, s’inspirant notamment de leur histoire familiale. La lettre d’Italie est de retour en Franche-Comté, à Belfort fin novembre mais aussi au Théâtre Edwige Feuillère début décembre. À la faveur d’une lettre retrouvée par hasard, Luca part sur les traces de son père, berger sarde devenu ouvrier à son arrivée en France.
Bruno Putzulu
Bruno, présentez-nous Luca, le personnage que vous incarnez.
C’est quelqu’un qui retourne sur la terre de son père pour y retrouver un frère, qu’il ignorait jusqu’à présent, sans dire à sa mère qu’il retourne en Sardaigne. Il retrouve aussi des amis, de la famille et puis le pays, les paysages.
La lettre d’Italie est-elle une pièce autobiographique ?
Alors oui, je sais ce que ça fait de retourner en Sardaigne, je suis toujours très ému, et quand j’en repars aussi ! Le pays, la terre ont aussi une grande importance, les parfums, c’est à peu près ça, Luca. C’est vrai qu’il y a une similitude mais par contre, je n’ai pas de frère qui habite en Sardaigne, c’est complètement de la fiction.
Photo : Carbone Café
Vous avez joué Les Ritals en 2023 à Belfort, et l’on peut également y voir des point communs…
Oui il y a des similitudes : le père, la France et l’Italie, deux pays aimés je dirais, mais quand on est sur la terre de l’un, l’autre nous manque, c’est comme ça ! Vous incarnez notamment votre père dans la pièce, en vous inspirant ici de votre vrai père, à l’occasion d’un monologue…
Oui c’est un monologue sans en être un… Une longue partie où le père a la maladie d’Alzheimer, ça c’est commun avec notre histoire familiale. Et pendant que je lui parle, il dort un peu, je ne sais pas s’il fait semblant où s’il dort vraiment… Et puis j’essaie par des évocations de lui ramener la mémoire, qu’il finisse ses phrases, qu’il se rappelle lui aussi… Même si c’est une petite chose ça fait plaisir, tout d’un coup c’est comme s’il revenait à la vie. Je lui parle du passé pour voir s’il va réagir, s’il va à nouveau parler.
Mario Putzulu
Comment est née l’idée de cette pièce ?
La lettre d’Italie doit son existence à la rencontre qu’on a faite avec Eleonora Rossi, directrice du GRRRANIT. Eleonora avait déjà rencontré Bruno à la Comédie Française il y a très longtemps, et on jouait Les Ritals à Colmar. Elle est venue nous voir et à la suite de cette représentation, elle a proposé à Bruno d’être artiste associé. Ce texte au départ, c’étaient des gribouillages, des notes prises comme ça après la mort de mon père, que j’ai rassemblées et réécrites. Pour moi l’intention était bien sûr d’honorer et de prolonger la vie de mon père.
Bruno nous a confié qu’il s’agit cependant d’une histoire imaginée ?
En effet, mais les personnages ont pour la plupart vraiment existé, des synthèses de personnes que j’ai croisées en Sardaigne, en France, mais l’histoire est inventée.
Quels thèmes avez-vous souhaité traiter dans La lettre d’Italie ?
Le spectateur pourra trouver différents fils: le langage par exemple, et ce que le silence peut provoquer. Le fait de posséder le langage ou au contraire d’en avoir très peu… Les migrations aussi: un père émigré, une mère ouvrière française qui donnent naissance à un fils qui acquiert la culture française, qui est complètement français de culture, mais trimballe aussi un peu de culture italienne. Il a aussi une culture ouvrière et il est, par ses études et par son métier, comédien, passé par la Comédie Française, ce qu’on appelle maintenant un transfuge de classe… Je préfère un “trans-classe”. Il ne fuit pas vraiment sa classe. Il change de classe et se demande ce que sa vie aurait été s’il était né en Sardaigne…
– Propos recueillis par Caroline Vo Minh –
La lettre d’Italie, Belfort, GRRRANIT SN, 28 novembre à 20h, 29 novembre à 19h
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