Anne-Sophie Jahn – Bob Marley et la fille du dictateur

ESSAI

Grasset

Le 11 mai 1981 disparaissait Bob Marley, « prophète de la bonne parole rasta » et du reggae. La journaliste Anne-Sophie Jahn nous montre une facette moins connue de ce quasi dieu vivant, à travers sa relation avec Pascaline Bongo, fille du président du Gabon Omar Bongo. Bob Marley et la fille du dictateur revient sur cette idylle discrète, voire gardée secrète pendant plus de quarante ans, et qui débute un soir de novembre 1979 après un concert à Los Angeles. Les histoires du mouvement rastafari et de l’Afrique s’incarnent dans cette brève mais intense relation entre le chanteur et sa princesse.

Anne-Sophie Jahn - Bob Marley et la fille du dictateur - Grasset - Chronique du livre

Moins célèbre que Rita, l’épouse « officielle » de Bob Marley, Pascaline Bongo a cependant tenu une place particulière auprès du chanteur, l’accompagnant dans les dernières semaines de sa vie. À 23 ans, elle est certes l’héritière avec son frère Ali de la fortune colossale du président gabonais, mais elle a aussi la tête sur les épaules, indépendante et déterminée – elle sera Ministre des affaires étrangères dans les années 90 -. Pour les besoins de son enquête, Anne-Sophie Jahn l’a rencontrée à Paris, parvenant à obtenir quelques confidences de cette femme discrète. La journaliste s’est également rendue au Gabon, aux États-Unis, et jusqu’en Jamaïque pour rencontrer l’entourage de Bob Marley dont Chris Blackwell, fondateur du label Island, artisan de son rapprochement rock et reggae, ou encore le bassiste Aston Barrett… « dans un quartier chaud de Kingston » !

Il faut bien cela lorsque l’on veut aborder le monument Marley, quitter les grands chemins balisés et autres poncifs quelque peu « fumeux » du reggae. Tout en rappelant son influence déterminante dans l’histoire de la musique, Anne-Sophie Jahn a aussi creusé le côté sombre de Bob Marley. Celui que Cindy Breakspeare – mère de Damian – compare à Martin Luther King, Nelson Mandela… – et même Mère Teresa, excusez du peu – pouvait se montrer particulièrement violent, et notamment à l’égard de ses multiples compagnes. L’essai aborde d’ailleurs la question de la condition féminine chez les rastafaris, prenant l’exemple de son épouse Rita. « Les devoirs dont Bob devait s’acquitter ne lui permettaient pas d’avoir une relation intime avec sa femme sur la route. Comme le roi Salomon, il la sommait de venir quand il voulait avoir des relations sexuelles avec elle et elle devait venir, c’était son devoir, mais le reste du temps, elle devait rester seule avec ses dames de compagnie », confie la chanteuse Judy Mowatt à l’auteure.

La relation avec Pascaline fut d’une autre teneur, Marley semblant fasciné par le côté africain de cette dernière, qui symbolisait comme un retour aux sources pour le rasta né en Jamaïque. Pascaline, c’est un peu la Terre promise, Zion, dont a parlé le prophète du mouvement rastafari Marcus Garvey. La jeune femme offre l’opportunité au chanteur de donner son premier concert en Afrique, dans la capitale du Gabon, Libreville, le 1er janvier 1980. Bob Marley et la fille du dictateur se lit parfois comme un roman (ah, les histoires d’amour et la musique…), lorsqu’il croise ces deux destins que tout opposait à l’origine – elle, fille d’un chef d’État tout puissant, lui enfant pauvre et métis de Kingston -. L’essai d’Anne-Sophie Jahn vaut aussi pour sa dimension historique, nous plongeant dans l’histoire de l’Afrique au tournant des années 80, à l’époque où des pays comme le Gabon s’enrichissent considérablement grâce au pétrole, souvent au profit des dirigeants, pas vraiment du peuple.

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