Arnaud Le Gouëfflec-Nicolas Moog – Underground

BANDE DESSINÉE

Glénat BD

Arnaud Le Gouëfflec et Nicolas Moog publiaient le 14 avril dernier un gros pavé en textes et en dessins, 300 pages (il fallait bien ça) qui mettent un coup de projecteur sur des musiciens et des musiciennes dont l’influence n’est pas proportionnelle à leur célébrité. Sa couverture, pastiche du Sergent Pepper’s, affiche un panthéon alternatif. Trente-six parcours éclectiques, du free jazz au rock indé, du blues jusqu’aux musiques exotiques, en passant par le garage rock, le classique, la musique minimaliste et le drone, et bien d’autres esthétiques. Même la chanson française y passe avec l’engagée Colette Magny ou encore la déjantée Brigitte Fontaine. Des heures de playlists/plaisirs à constituer en perspective !

Arnaud Le Gouëfflec - Nicolas Moog - Underground, rockers maudits et grandes prêtresses du son - Glénat BD - Chronique bande dessinée

Underground, rockers maudits et grandes prêtresses du son traite avant tout de la Création avec un grand C (soyons fous), de ces parcours d’individus dits inadaptés, la mère de Daniel Johnston taxant ainsi son rejeton de « fainéant improductif ». Des artistes en marge, prompts à emprunter la voie du « Free », expérimentant, sans cesse repoussant les frontières de ce que l’on nomme communément l’avant-garde, fuyant les dogmatismes et les compromissions.

Malheureusement, le génie n’immunise pas contre la misère à l’image de Louis Hardin, alias Moondog, qui le jour enregistre avec le New York Philharmonic… et dort sur les trottoirs de Big Apple la nuit. Le musicien est le premier d’une longue série d’artistes que l’on peut retrouver dans Underground. Et ces parcours s’accompagnent d’ornières multiples, maladies physiques ou mentales, détresse économique et sociale, solitude. Mais c’est peut-être cet « exil intérieur », dont nous parlent les auteurs au sujet de Kevin Coyne, qui pousse ces artistes sur la voie de l’innovation. Arnaud Le Gouëfflec et Nicolas Moog leur rendent un hommage d’autant plus nécessaire qu’ils ont été faiseurs d’étincelles et ont suscité des carrières chez d’autres, qui deviendront bien plus célèbres. La plupart de ces musiciens et musiciennes ont été avant tout des visionnaires, ayant anticipé des évolutions dans la musique, voire les ayant provoquées eux-mêmes. Difficile de ne pas penser à Daft Punk lorsque l’on évoque The Residents qui ont passé leur carrière à dissimuler leurs visages. Maîtrise totale de la chaîne artistique également pour le duo Tall Dwarfs qui a aussi popularisé le do-it-yourself et le « lo-fi ». Quant à Jonathan Richmond et ses Modern Lovers, leur carrière éclair ne les empêchera pas de devenir une référence pour les groupes punks de la fin des années 70.

@Glénat

Arnaud Le Gouëfflec et Nicolas Moog commettaient déjà en 2015 dans La Revue dessinée, la BD Face B, s’intéressant à quelques rockeurs et rockeuses en roue libre. Ici ils élargissent le spectre musical même si une fois encore, le noir et blanc va à l’essentiel. Nicolas Moog prend un malin plaisir à donner corps aux univers tortueux et surréalistes de trente-six artistes. L’humour n’est pas absent, tel Charles Ives surgissant… d’un marécage du Sud des États-Unis, au chapitre consacré au grand bluesman John Fahey. Nicolas Moog et Arnaud Le Gouëfflec maîtrisent l’art de la synthèse et ne font pas l’impasse sur les disques importants de chaque artiste (pratique pour les playlists !). Citons enfin Arnaud Le Gouëfflec lorsqu’il évoque le travail de Tall Dwarfs : « chaque page tournée révèle son lot de merveilles… richement rehaussées d’un pinceau pourtant économe ». Une remarque qui s’applique sans nul doute à Underground, rockers maudits et grandes prêtresses du son.

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