Théâtre national de Strasbourg – Incendies du 25 avril au 15 mai 2016

> Article publié à l’origine dans le numéro d’avril-mai 2016 du journal Diversions – consulter ici

Incendies, que Stanislas Nordey mettait en scène en 2008 et qu’il reprend au TNS du 25 avril au 15 mai, s’inspire des conflits au Liban entre la période 1975 -1989 et en 2006. Au Québec en 2003, au décès de leur mère, Jeanne et Simon, des jumeaux, découvrent que leur père qu’ils croyaient mort est bien vivant, et qu’ils ont un frère. À chacun, ils ont pour mission de remettre une lettre. Ils partent alors pour le Liban, pays de leurs origines, pour tenter de guérir des douleurs refoulées et apporter des réponses à des questions qui les hantent.

Incendies au TNS

Incendies au TNS – Photo : Jean-Louis Fernandez

Loin de se cantonner au contexte libanais, la pièce que retrouve Stanislas Nordey à Strasbourg, évoque plutôt les conflits d’un point de vue universel, la poésie de Wajdi Mouawad faisant résonner diverses problématiques autour de la vie et de la mort, mais aussi de l’amitié, de l’amour et des liens familiaux. Mais c’est pourtant bien la question des origines qui réside au cœur d’Incendies. Au-delà de la mort, Nawal demande en effet à ses enfants de retrouver son fils, leur frère dont ils ignoraient jusque-là l’existence. Mais si la quête est noble, c’est aussi une boîte de Pandore qui est ouverte, et les jumeaux sont sur le point de découvrir l’indicible de leur origine. Ils partent en quête de leur histoire familiale, de vivants qu’ils croyaient disparus, mais aussi de fantômes.

Un autre constat s’impose. La guerre fait voler en éclats les identités et les repères – et notamment le premier ancrage qui est celui de la famille -. Pourtant, Incendies demeure une pièce « sur la façon de rester humain dans un contexte inhumain », comme l’a dit Wajdi Mouawad. Stanislas Nordey a choisi de décliner le personnage de Nawal à trois époques de sa vie : jeune femme, femme mûre et vieille femme, mais tout en optant pour une narration non chronologique. Passé et présent se côtoient en effet dans la pièce, se frôlent constamment. La tragédie se joue quant à elle dans un décor épuré, où seul le retentissement d’un gong annonce les changements de lieux et d’époques. Habillés de blanc, les acteurs appartiennent au présent et vivent en Occident, tandis que ceux vêtus de noir nous parlent depuis des époques passées et l’Orient. Les dialogues qu’ils entretiennent les uns avec les autres peuvent être considérés comme des tentatives d’apaiser des conflits familiaux, des affrontements qui s’étendent sur plusieurs générations, confrontations souvent intenses. Un sentiment de perte, d’abandon, qu’il convient aussi d’atténuer.

Stanislas Nordey expliquait au Théâtre de la Colline, lors de la création de la pièce en 2008, qu’Incendies est à la fois une pièce de rires et de larmes. « Il y a une traversée tragique et en même temps il y a deux personnages qui apportent un contretemps très proche du burlesque, et donc il y a un entrelacement très fort de tous ces amours du théâtre, l’amour de la comédie, de la tragédie ». Wajdi Mouawad n’a pas vécu la guerre du Liban de l’intérieur, ses parents ayant quitté le pays lorsque le premier conflit a éclaté dans les années 70. Incendies est pourtant un travail très intime à l’auteur, le dramaturge ayant évoqué « une nécessité de faire ressurgir cette violence. Elle était dans mon cas tellement enfouie, qu’avant même de me poser la question de comment la raconter, il fallait que je la fasse surgir ».

– Marc Vincent –

Incendies, Théâtre National de Strasbourg, du 25 avril au 15 mai (Salle Koltès) – www.tns.fr

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