Réédition – MC Solaar – Qui sème le vent récolte le tempo

HIP-HOP

Universal Music/Polydor

Voici des décennies (deux pour être précis), que les disciples de Claude M’Barali attendaient cela, la réédition des trois premiers disques du pionnier du rap hexagonal. L’artiste a pu enfin s’entendre avec Polydor, et la série de rééditions commence en ce début d’été avec Qui sème le vent récolte le tempo, opus inaugural qui a changé beaucoup de choses en France en matière de hip-hop.

MC Solaar - Réédition Qui sème le vent récolte le tempo

« Une vague, un cyclone, que dit la météo ? Qui sème le vent récolte le tempo ». La chanson signature de MC Solaar donne son titre à ce premier album qui fit bouger les lignes au début des années 90. Pour les cinq années à venir, en compagnie d’autres artistes comme NTM et IAM, Claude M’Barali allait faire la pluie et le beau temps dans le rap français. Avec le premier single Bouge de là, Solaar portait le hip-hop sur les ondes des grandes radios et des chaînes de télévision. On découvrait un jeune rappeur d’origine tchadienne, né au Sénégal et qui proposait, en compagnie du producteur Jimmy Jay /Christophe Viguier (aujourd’hui on dit beatmaker, c’est plus chic), une musique nouvelle accompagnant des textes engagés ou décalés, « du rap d’attaque, qui frappe, épate, matraque » comme le scande l’artiste sur la chanson éponyme. Le titre Qui sème le vent récolte le tempo sonne d’ailleurs comme un manifeste. Si le rap de M’Barali n’était pas aussi musclé que celui d’NTM, il n’évacuait pourtant pas les problématiques de l’époque, raillant les fashion addicts avec Victime de la Mode sur une musique faussement cool, évoquant la misère sociale sur le plombé Armand est mort. En « para-commando des mots », Solaar envisage déjà son art comme une lutte, annonçant son chef d’œuvre trois ans plus tard, Prose Combat, réédité quant à lui en septembre prochain. Paradisiaque, troisième planète jadis bannie du système Solaar, est attendu en fin d’année (en double album avec MC Solaar).

 

Les instrus de Jimmy Jay fleurent bon le Old School, apprécient les couleurs cuivrées, les rythmiques funky (Matière grasse contre matière grise, L’histoire de l’art, La musique adoucit les mœurs) et les samples jazzy (À temps partiel). Ailleurs le redoutable manieur de platines flirte avec la pop sur le sensuel Caroline, avec comme colonne vertébrale un sample de batterie de Southside Movement (Save The World), ou choisit des climats plus abrasifs (Quartier nord, Ragga Jam). Avec Qui sème le vent récolte le tempo, MC Solaar inaugurait en outre sa collaboration avec Hubert Blanc-Francard, alias Boom Bass (Cassius) qui réalise l’album avec Jimmy Jay, tandis que le regretté Zdar, l’autre moitié de Cassius, va enregistrer et mixer le disque. Dès l’arrivée de l’album dans les charts, les plus avisés ont évoqué Bobby Lapointe, tant MC Solaar envisageait la langue française comme un terrain de jeu. Sa musique, il la souhaite tour à tour « amusante ou militante » comme il le confie sur À temps partiel, et s’il était de bon ton de railler MC Solaar dans les fades années 2000 (trop sage, trop naïf, trop commercial…), toute une génération le redécouvre aujourd’hui et c’est tant mieux.

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