Besançon – Expositions Valises ! à la Citadelle

La Citadelle accueille en son sein le Musée de la Résistance et de la Déportation. Il propose en ce moment sa deuxième exposition temporaire depuis sa réouverture en septembre 2023. Une exposition qui traite de la valise, objet lourd de sens (au pluriel).

On peut faire sa valise pour de multiples raisons : vacances, escapade le temps d’un week-end, voyage d’affaire… À partir de 1936, les Français ont droit à deux semaines de congés payés, et dès lors la valise va se généraliser. Mais dans d’autres régions du monde, la valise a une connotation toute autre : départs forcés, fuites, exils, “un état de fait qui touche des millions de personnes à travers le monde, et notamment entre 1939 et 1945”, explique Étienne Deleurme, médiateur au Musée de la Résistance et de la Déportation. L’exposition va donc largement se pencher sur ces exils forcés en divers endroits du monde: fuite des Républicains espagnols en 1939, exode français de mai-juin 1940 avec huit millions de français jetés sur les routes, sans oublier bien évidemment la déportation, ou encore la résistance avec le transport de matériel et de denrées alimentaires, souvent au péril de sa vie…

Mais l’objet valise est également un “témoin silencieux”, comme le souligne Étienne Deleurme, de ces histoires d’exils. Ces départs sous la contrainte, on en retrouve notamment une illustration avec la valise ayant appartenu à David Apotheker, homme d’affaire de confession juive qui parcourait l’Europe. Quand la deuxième guerre mondiale éclate, il fuit et accomplit tout un parcours à travers le monde. Il va vivre dans le ghetto de Shanghai de 1941 à 1946, refuge précaire (territoire d’environ 1,5 km² où près de 17.000 réfugiés juifs furent entassés…). Sa fille, Annette Rosen, fera don de sa valise au Musée de la Résistance et de la Déportation de Besançon. L’occasion de découvrir son histoire dont il parlera très peu. Sa fille a reconstitué elle-même le parcours grâce aux autocollants placés sur la valise lors de son périple.

Parmi les valises à découvrir, l’une d’elles a appartenu à Jean Stetten-Bernard, un illustrateur qui s’est engagé dans la résistance en produisant de faux papiers. Mobilisé et fait prisonnier, il parvient à s’échapper en falsifiant des documents. De retour en France, il monte un petit atelier de faussaire dans l’arrière-cour de l’usine de son oncle. Plus tard il s’installera à Vourles dans le Rhône, et dans une cabane du parc de la maison familiale, dissimulera un deuxième atelier. Jean Stetten-Bernard va tellement exceller dans son art qu’à partir de 1943, il travaille avec des réseaux de résistance dont l’AS (Armée secrète) puis le BCRA (Bureau Central de Renseignements et d’Action). Près de 100.000 faux papiers sortiront de son atelier clandestin. Environ 600 cachets seront également falsifiés. Le faussaire parviendra à préserver son activité, obtenant la médaille de la Résistance. Tout son matériel tenait dans deux valises, dont l’une d’elles est présentée dans l’exposition, appartenant au fonds du musée. Elle est accompagnée d’une série de photos prises après la guerre, documentant la façon dont Jean Stetten-Bernard s’y prenait pour produire les faux papiers.

– Propos recueillis par Caroline Vo Minh –

Valises !, Besançon, Citadelle (Musée de la Résistance et de la Déportation), jusqu’au 31 décembre
citadelle.com

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